Faits divers du 10 août 2006.

Souvenez-vous, nous sommes à la mi-mois de juillet, les autorités remuaient ciel et terre afin de lever le voile sur la disparition d'une jeune femme. Seul suspect à l'heure actuelle ? Le mari. La voisine du couple nous témoigne, « je n'ai aucun doute sur la culpabilité de cet homme. La pauvre femme doit être morte sous les coups de son mari et passez-moi l'expression mais ce salaud doit se réjouir face à la simplicité de notre police qui espère encore à une disparition et non à un meurtre. Bon sang mettez-le sous les verrous de la ville. »

Aujourd'hui nous ne pouvons toujours pas certifier tous les propos de cette dame, cependant le corps de l'épouse vient d'être retrouvé. La voisine avait donc vu juste sur un point. Alors, crime passionnel ? Suicide ? Simple accident ? Les informations filtrent peu. Seule certitude, le mari est passé de suspect à coupable. À l'heure où vous lisez votre journal, la police fait son boulot et une question demeure. Comment notre paisible petite bourgade peut-elle abriter une telle atrocité ? Nicky Joosten, journaliste.

Lettre du 16 juillet 2009.

Tu m'as toujours dit que Cascade Locks était la plus belle ville au monde, juste parce qu'elle y abritait sa huitième merveille. Et pourtant tu es parti. J'espère que Laila va bien. Tu as toujours su t'occuper d'elle depuis la mort de vos parents. Tu sais notre vie à tous les trois me semblait curieusement parfaite, malgré ses cris qui animaient nos conversations et dont tu baissais le volume dès que ta sœur était dans les parages. Tu crois vraiment qu'elle ne remarquait rien ? Que nos clameurs et nos heurts se taisaient à ses oreilles ? Laila n'est pas dupe, ni contrariante. Combien de fois son regard s'est posé sur tes poings serrés. Sur mes larmes. Tu n'étais pas un mauvais mari. Non. Tu étais tout simplement blessé. Nous étions deux. Je te demande pardon pour ce que j'ai fait… pour la souffrance que j'ai engendré au sein de notre couple. Oui je me sens coupable. N'est-ce pas l'accusation que tu me portais à l'époque ? Tu es l'homme à qui j'ai promis un tas de choses sur l'autel. C'est en aparté que je t'ai promis de te donner un fils. Et je n'ai pu tenir ma promesse. Je t'en prie ne me reproche plus la mort de notre enfant. J'ai trop souffert, autant que toi et j'en ai conscience. Sais-tu que Laila était au courant ? Toi qui voulais la protéger de tout. De nos problèmes. Surtout passe-lui le bonjour. Et dis-lui que j'ai hâte de la revoir, elle et… toi. Tu me manques. J'ai besoin de toi. Je me sens tellement perdue. Ces gens disent me connaître et moi, je ne connais que toi. Toi et Laila. Je n'ai pas à me plaindre, tu sais. La seule chose que je ne supporte pas, sont les on-dit. Et crois-moi je n'en fais pas une réalité. Je suis restée près de deux ans dans le coma. Tu n'étais pas là à mon chevet mais je ne t'en veux pas. Ce n'est pas ta faute. À mon réveil tous mes souvenirs avaient disparus. J'ai appris à me rappeler. J'ai mis du temps. Ton image m'apparaît dans mes rêves les plus agités. Je n'ai pas dit de mes cauchemars. Ce sont ces rêves qui m'ont aidé à me souvenir de toi. Je me souviens de tout. Du rire de Laila jusqu'à ta bière favorite, en passant par cette adresse à laquelle je t'envoie ma lettre. N'est-ce pas la maison de ton enfance ? La vision de cette demeure m'est encore trop floue sauf son adresse. Je sais que tu t'y rends deux fois par an, tel un pèlerinage. J'espère juste que tu ne comptes pas déroger à la règle pour cette année.

Je t'en prie, reviens à Cascade Locks.

Ta femme,
Judi.