Home sweet home. Tu le sentais bien cette fois. Ce nouveau départ serait le bon. Tu te tenais là, devant ta nouvelle demeure, avec elle. Tu voyais dans ses yeux l'espoir d'un renouveau. C'est ce qu'elle désirait. Elle voulait que tout change pour vous et que tu ailles mieux. Cascade Locks pour toi, c'était un pensée très ancien. Tandis que ton regard se perdait sur l'orée de la forêt, tu repensais à ton enfance. Tu te souvenais de toutes ces fois où tu te retrouvais au coin sans même comprendre pourquoi. Tu te rappelais également combien ton père appréciait te rappeler qu'il attendait bien mieux de toi. Chaque année, il prenait un malin plaisir à te montrer combien il allait s'amuser sur son île privatisée pendant que toi, tu étais exilé chez son vieux fou de père qui vivait ici. Pour lui, vivre dans sa vielle bâtisse, dix fois plus petite que ta maison devait être la pire de toutes les tortures. Pour toi, c'était un vrai instant de paradis. Ici, tu n'étais pas un fils de grandes familles, tu n'étais pas un nom que la plupart des gens connaissaient, tu étais toi-même. Tu grandissais, tu bougeais, tu t'épanouissais. Toute cette colère que tu avais en toi, ton mauvais caractère, toutes tes bêtises, elle diminuait dans cette ville. Ta pénitence devenait une délivrance. Tu n'avais plus à supporter des gens que tu ne comprenais pas. Tu côtoyais ta famille tous les jours mais elle t'était plus qu'étrangère. Jamais tu ne les avais aimés. Jamais tu n'avais ressenti le besoin de leur faire un câlin. Triste à dire mais tu avais toujours été ce gamin bizarre. Tu étais celui qui n'avait pas parlé pendant plus de six mois parce qu'il ne trouvait pas de sens aux mots. Tu étais celui qui allait chercher les plus grands à la récrée pour te battre parce que cela te faisait ressentir plus vivant. Tu avais trop tôt ressenti cette impression de faire partie d'un monde que tu ne comprenais pas. Tu ne voyais pas l'intérêt de miser l'intelligence d'une personne sur un système de devoirs, contrôles et bulletin. Tu étais un piètre élève. Turbulent, tu entraînais les autres élèves de la classe en rébellion contre l'institutrice. On disait de toi que tu étais un mauvais élève voir un véritable cancre. Tu savais qu'ils se trompaient tous autant qu'ils étaient. Tu as toujours été cultivé. Tu aurais pu devenir le chouchou d'un professeur si tu avais daigné répondre à leurs questions ou faire les énoncer. Tu voulais prouver que tu étais plus fort que le système mis en place ou qu'il ne te convenait pas. Tu savais dire le nombre pi jusqu'à la neuvième décimale mais tu étais bien incapable de réciter les tables de multiplications quand on te le demandait. On t'avait fait redoubler une classe pour que cela te serve d'avertissement mais tu n'en avais été que plus démotivé. Pourquoi revoir une deuxième fois, une matière qui t'avais semblé aussi insupportable la première fois ?

T'emparant des valises dans le coffre, tu rentras dans ta nouvelle demeure. Vous aviez fait le bon choix de l'acheter plus ou moins équipée. Cela faisait moins de meubles à transporter et puis, tu n'avais pas envie de payer un immense camion à travers tout le pays. La première chose que tu fis fut de ranger ton arme dans la petite commode de l'entrée. Tu la mettais toujours là quelque que soit ta demeure.Tu avais peur d'en oublier l'endroit au mauvais moment et tu savais qu'elle n'aimait pas que tu le gardes sur toi, surtout chez vous. La déposant, tu te souvenais de la première fois que tu en avais tenu une. C'était dans ton enfer... Ton père avait finalement trouvé un moyen de te faire payer ton ignoble comportement. Il t'avait envoyé dans cette école militaire. D'école, ils n'avaient que le nom et les cours. C'était un abattoir où l'on essaya de te dresser. Tu avais résisté, aux insultes, aux nuits passé dans la boue parce que tu n'écoutais pas, aux règles en bois sur les doigts. Tu avais tout eu parce que tu ne suivais rien. Ils t'avaient coupé les cheveux pour te rendre plus docile, cela n'avait rien changé. Dans ton enfer sur terre, tu avais trouvé des gens comme toi, des déchets de la société qu'on voulait recycler afin de donner un peu plus de beauté au monde... Tu avais vu les faibles craqués, tu avais vu les fous se déchainer sur les plus jeunes, tes yeux s'étaient habitués aux blagues de mauvais goûts et à tout ce que tu n'aurais jamais pensé être capable de supporter. Là-bas, tu avais pourtant trouvé une échappatoire. Elle était arrivée sous la forme d'une drôle de cigarette. Jamais tu n'avais goutté à cela mais lorsque c'était arrivé devant toi, tu n'avais pas résisté. Comme une fleur dont on enlève les pétales, tu t'étais mis à aimer cela, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie. Après un petit temps, les joints n'avaient plus suffi, il t'avait fallu des petites pilules, puis de la jolie poudre blanche et tu avais fini à la seringue. Ta prédilection, elle s'était démarquée pour l'héroïne, avec ça, tu fonçais dans les nuages et tu oublias tout le reste. Oh, tu avais toujours été assez fort pour cacher ce que tu ne désirais pas qu'on découvre. Tu faisais tes petits trafics dans le dos des autres. Tu réclamais à ton géniteur un argent qu'il t'envoyait de bonne grâce parce que cet imbécile se sentait coupable de t'envoyer là-bas. Toi tu en profitais parce que c'était si facile. Cet enfer, c'était devenu ton monde. En grandissant, tu avais appris les ficèles. Tu avais compris qu'en te montrant charmant, on arrivait à oublier tout le reste. Tu restais cet adolescent brulant d'une flamme incomprise. Tes poings répondaient mieux que ta bouche. Tu finissais souvent à l'isolement mais ils n'en avaient que faire. Ton père les engraissait d'argent pour te garder, alors, ils continuaient. Tu étais leur poule aux œufs d'or. Ils te faisaient rater une année pour te garder plus longtemps près d'eux. A dix-huit ans, tu avais pensé que tout cela prendrait fin mais ils avaient une autre idée en tête. Tu étais toujours mineure et tes parents ne voulaient pas te revoir. Tu étais un danger pour leur famille si parfaite. Leur argent payait tout même ta prison... Tout ce que tu désirais c'était les fuir, eux et leur argent de malheur, eux et leurs bonnes manières, eux et leurs apparences si fausses. Ils ne t'aimaient pas parce que tu refusais de jouer le jeu. Tu n'allais pas sourire à des gens que tu ne pouvais apprécier. Tu n'allais pas regarder tes géniteurs s'embrasser alors qu'ils ne s'aimaient plus depuis belles lurettes. Ils avaient des amants et ils se contentaient de faire croire qu'ils allaient bien. Tu n'allais pas trouver la nouvelle copine de ton frère mignon alors que son penchant premier était pour la gent masculine. Tu n'allais pas non plus rester sobre pour voir l'affligeant spectacle de ta soeur. Habillée comme une prostituée, elle se prenait pour la prochaine Paris Hilton. Tu savais par ailleurs, qu'une sextape de ses débats circulait sur le net. Non, tu ne pouvais apprécier des gens qui jouaient à la famille unie alors qu'ils se donneraient tous des coups de poignards pour un peu plus d'héritage.

Tu la vis rentrer chez vous et son sourire s'illumina. Elle avait tout ce qu'elle désirait, cela se voyait dans ses yeux et cela faisait bien longtemps que tu ne l'avais plus vu ainsi. Elle était toutefois aussi belle que le jour de votre rencontre. Tu n'avais jamais cru en l'amour ni à ces balivernes de coup de foudre. Pourtant, cela c'était imposé à toi lorsque tu l'avais vu... Belle, éblouissante tel un phare éclairant ton monde. Tu l'avais désirée dès le premier instant où elle était apparue dans ton enfer, le vôtre maintenant. Tu n'étais pas le roi des mots, tu n'avais jamais aimé, tu ne savais pas comment faire. Tu t'y étais pris comme un sombre crétin. Tu l'avais embrassée pour lui montrer ton intérêt. Parce que tu la voulais comme petite amie, tu avais frappé chaque garçon qui l'approchait d'un peu trop près. Tu ne savais pas exprimer tes émotions comme tout le monde mais bizarrement, elle t'avait compris. C'était comme si vos âmes étaient faites pour s'entendre. La laisser partir était devenu impensable pour toi. A vingt et un an accompli, tu avais enfin quitté ta prison et tu étais partie avec elle. Tu ne voulais plus rien avoir à faire avec ta famille, tu voulais vivre ta vie mais tu étais empoissonné de l'intérieur... Tu étais un drogué, l'admettre ou non ne changeais rien à la situation. Tandis qu'Azenor étudiait, tu t'enfermais dans un monde de plaisir. Tu oubliais tout et tu te contentais de ces instants où la vie prenait enfin son sens. Elle te voyait dépérir, elle voulait t'aider mais toi tu ne désirais aucune aide. Ta vie te convenait comme elle était. Tu aimais son côté au jour le jour, tu appréciais de te laisser aller sans aucune conséquence. Tu tournais mal, de plus en plus. Tu te battais, tu volais, tu pouvais devenir violent rien que pour une petite dose. Tu haïssais le monde et il te le rendait bien. Tu étais sur une corde raide et un rien pouvait te faire sombrer définitivement... Toutefois, ta pire action, c'était tout ce que tu lui faisais subir à elle. Tu ne savais pas aimé et au fond de toi, cette petite voix te rappelait sans cesse que tu n'étais pas assez bien pour elle. Par moment, cette petite pensée envahissait ton être et t'amenait à te comporter comme le pire homme sur terre. Dans ses moments-là, elle n'était plus la femme que tu aimais mais ta chose. Personne ne pouvait la toucher, personne ne pouvait l'approcher. Tu jalousais chaque garçon de son entourage. Tu frappais chaque homme qui osait la toucher ne serait-ce que pour une poignée de main. Ton corps devenait un brasier de violence. Elle avait aussi son petit caractère alors, elle te répondait et toi tu te déchaînais. Tu ne voyais plus que ta rage... et elle était sans fin. Tu oubliais l'amour et tu la frappais comme si c'était la chose la plus naturelle au monde. Tu lui faisais du mal alors que tout ce que tu désirais c'était de pouvoir l'aimer. Il semble que c'était la seule manière que tu avais trouvé pour le lui montrer. Tu ramenais d'autres femmes dans votre lit car cela la faisait pleurer. Pour toi, chacune de ses larmes n'était qu'une preuve supplémentaire qu'elle t'aimait. Tu la testais toujours et en toute occasion parce qu'elle était lumière là où tu étais noirceur et que tu savais qu'un jour, elle le remarquerait et qu'elle te quitterait. Tu ne voyais pas que chaque de tes actions l'amènerait vers cette direction...

« On va être heureux ici. » Tu étais là pour elle, parce qu'elle n'avait plus supporté ton mal être et tes bêtises. Elle t'avait vu dans ton pire état, à deux doigts de l'overdose et elle t'avait supplié de tout son coeur de te soigner. Pendant un instant, elle avait réussi à t'atteindre et tu avais accepté de faire ce qu'elle te demandait. Tu avais essayé de changer pour elle. Tu avais décidé de l'emmener loin de la ville, loin des conneries mais tu ne pouvais changer ta nature. Vous étiez ici parce que tu avais fait une dernière visite à ton paternel. Tu avais joué le fils prodigue et il t'avait cru. Il avait été fier de toi pour la première fois de ta vie et toi, tu lui avais volé un beau pactole. Parce que tu te moquais totalement de lui. Tu voulais offrir un château à ta princesse. Tu n'avais aucun diplôme, peur d'argent alors comme toujours tu avais choisi la facilité. Tu étais allé te servir. Vous étiez parti loin de tout et tu étais revenu sur les pas de ton enfance comme si revenir là où tu étais un tant soit peu libre te délivrait de tous tes démons... « Toi et moi contre le reste du monde. » Tu la soulevas du sol et tu l'embrassas avec fougue. Comme un jeune marié, tu la conduis jusqu'à votre lit, sans drap mais tu avais déjà une petite idée derrière la tête. « Et si l'on fêtait notre nouvelle maison ? » Tu désirais cela ardemment mais tu vis dans son visage que la réciproque n'était pas vraie. « Arthur, je dois encore défaire toutes les casses et le lit n'est pas encore fait. Chaque chose en son temps... » Tu n'avais jamais aimé qu'on te dise non. Tu n'arrivais pas à l'accepter et la donne n'allait pas changer aujourd'hui... Sans le laisser le choix, tu la poussas sur le lit et tu te mis à l'embrasser. Elle te repoussa tout en la criant de la lâcher. Toute pensée claire avait disparu de ton esprit et tu l'avais frappé. Tu n'avais pas été tendre et tu la vis, les yeux remplis de larmes tandis que toi, tu reprenais peu à peu le dessus sur ta rage destructrice. Tu plongeas à ses genoux, la serrant tout contre toi. « Je suis désolé, je ne voulais pas. » Tu étais comme un vilain enfant qui avait fait une bêtise et elle te pardonnerait comme toujours. Parce que vous étiez ainsi, parce que vous vous aimiez trop pour avouer que votre relation n'était qu'autodestruction, parce que tu ne voulais qu'elle. Après quelques instants, tu te relevas. Tu avais le besoin de changer d'air. « Je vais aller voir comment avance les travaux au bar. » Tu l'avais embrassée et tu étais parti. Parce que tu savais exactement ce que tu allais trouver là-bas : une échappatoire. Elle t'avait demandé d'arrêter mais t'en était pas capable. Tu lui avais menti, tu t'étais contenté de trouver un lieu où elle ne pourrait pas t'observer en train de te détruire à petit feu. Tu voulais ressentir cette dose de bonheur, la seule qui pouvait combler ce vide intérieur...