► AGE : 32 ans ► STATUT : Célibataire. ► MÉTIER : Chef du service de chirurgie prédiatrique ► NATIONALITÉ : Américaine ► GROUPE : Everything's not lost ► POURQUOI CE GROUPE: Parce que les avis sont mitigés à mon égard... D'un côté ils ne peuvent nier mes compétences de médecin, et ça les arrange bien lorsque je sauve leur enfant, mais en même temps beaucoup ne supportent pas mon train de vie disons... libéré. Pas mariée, ni en couple, ne se cachant pas de ses conquêtes d'un soir. ► AVATAR : Jessica Chastain ► CRÉDIT : tumblr

Je regarde ma montre, 16h03. Merde, déjà 3 minutes de retard. Me hâtant vers les escaliers, j’attache ma longue chevelure de feu en une simple queue de cheval au sommet de mon crane. Je monte les marches deux à deux et m’arrête quelques secondes au sommet pour ne pas avoir l’air trop essoufflée puis avance vers la salle dans laquelle j’ai rendez-vous. Je bloque devant l’inscription sur la vitre fumée : Dr. J. Gabriel, Psychologue. Je pousse un soupir. Quand il le faut, il le faut. Déjà deux mois que je travaille dans cet hôpital et autant de temps que je repousse cette visite. Pourtant c’était l’une des conditions, je le savais… Je prends mon courage à deux mains, frappe trois coups sur la porte et la pousse. « Ah, mademoiselle Barton, je vous attendais. » Elle me sourit en me tendant la main et je n’ai d’autre choix que de l’imiter. Si elle savait combien je ne veux pas être là ! Elle ne tardera pas à s’en rendre compte. Mais bon, elle m’a l’air sympathique, ça aurait quand même pu être pire. Je m’assieds dans le divan et elle me demande : « Qu’est ce qui vous amène me voir ? » Je pouffe et dis : « Oh vous savez, j’ai pas eu tellement le choix… Ca fait deux mois que je dois venir. On m’a embauchée. Chef du service de pédiatrie. Il parait que c’est un passage obligé… alors me voilà. Finissons en au plus vite et nous serons débarrassées toutes les deux.» Elle me regarde d’un air un peu interloqué. Je ne suis pas là pour être gentille, je ne suis pas psy, moi. Allez, qu’elle se dépêche, plus vite on aura commencé, plus vite je pourrai sortir. « Vous n’avez clairement pas envie d’être ici… Pourquoi ? Qu’est ce qui vous gène ?» Je soupire et répond, en plantant mes prunelles dans les siennes : « Parce que j’en n’ai pas besoin, d’accord ? J’m’en suis toujours très bien sortie toute seule. Quand j’étais môme, y’a jamais eu personne quand j’en avais besoin, maintenant c’est trop tard. J’suis plus la gosse effrayée. J’suis une femme, et j’ai guéri seule. J’ai besoin de personne. D’accord !? » Elle soutient mon regard en hochant la tête et finit par détourner moi même les yeux. Elle ne peut pas comprendre de toutes façons. « Guéri de quoi ?» Cette remarque me fait sursauter. « De... trucs. » Avec un sourire elle s'empresse d'ajouter : « J'espère que vous êtes au courant que ça ne vous aide pas, et que ça ne me fait pas avancer... Mais c'est vous qui voyez, je ne suis pas pressée !» Je frotte le jean qui habille mes jambes de mes paumes et réponds, sans jamais croiser son regard cette fois : « Bon, d'accord... J'avais seize ans... On était une famille heureuse, vous savez? Il y avait mes parents, Kipling-Leo, mon grand frère, et mes deux jumelles de petites soeurs, Alexis-Joy et Julia-Lou. Et moi, Ella-May. C'était pas parfait, non, loin de là, mais... mais c'était bien. Ce jour là, on était tous en voiture, dans notre mini-van et on allait pic-niquer dans la campagne. Je me souviens, je ne voulais pas y aller, et Leo non plus. On était des adolescents, on trouvait ça barbant la famille. Mais on y a été tout de même. Enfin, c'est un bien grand mot. On n'a jamais pu atteindre la forêt. Ce qu'il s'est passé exactement, je ne saurais le dire. Personne ne le sait, en réalité. Tout ce dont je suis certaine, c'est que je me suis réveillée, dans un lit d’hôpital et que mes parents, Leo et Lou étaient morts. Il ne restait que moi, moi et Alexis, dans le coma. Je n'avais rien, simplement une jambe cassée et une commotion cérébrale. Rien. J'ai passé des jours entiers au chevet de ma petite soeur de quatre ans, le corps inanimé, à pleurer continuellement toutes les larmes de mon corps. J'évacuais tout pour être sure de ne plus pleurer lorsqu'elle se réveillerait.» Sans m'en rendre compte, ma main chasse machinalement une larme qui coule le long de ma joue. Seize ans que je n'ai plus pleuré. « Une semaine et demi plus tard, alors que les médecins perdaient espoir, elle s'est réveillée, et la vie a du reprendre son cours. Nous avons vécu chez notre grand mère, un temps, puis j'ai réussi à obtenir l'émancipation. J'ai vendu l'appartement dans lequel nous vivions et en ai acheté un plus petit, pour Joy et moi et nous avons vécu toutes les deux, grâce à l'argent de l'héritage et à ce qu'il nous restait de la vente. J'avais seize ans. J'étais une gosse, vous comprenez ? C'était pas facile, mais on l'a fait. Joy grandissait, je l'élevais... J'ai fini par entrer en fac de médecine, ai commencé à gagner ma vie, et on a enfin pu vivre normalement. » J'ai arrêté de cacher mes larmes. Celles ci ne renferment plus de la tristesse, de l'amertumes. Elles se sont transformées en perles acides de colère. Je me lève brusquement et pour replonge mon regard dans celui de la psy. « C'est nous deux, ça a toujours été nous deux. Vous comprenez ? J'ai pas besoin de vous. J'peux me débrouiller toute seule. J'ai besoin de personne pour m'en sortir, PERSONNE. » Le docteur Gabriel a alors une réaction pour le moins surprenante, elle me dit, sans bouger : « On se voit la semaine prochaine, même heure ?» Je la regarde, mâchoire et poings serrés et dis : « Même heure. » avant de tourner les talons et de claquer la porte derrière moi. Je cours dans le couloir et me réfugie dans la cage d'escalier, là je m'installe sur une marche, en appui contre le mur et enfoui la tête entre mes bras. J'ai craqué. J'ai craqué, et j'ai besoin d'elle.