~ remember that day ~

My life makes me want to runaway.

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Jack se levait doucement, presque péniblement, de son lit en bois foncé qui menaçait de s'écrouler sous son poids. Le réveil lui rappellait une douleur que même quatre ans n'avaient pas réussis à faire oublier. Il le prit, puisant dans ses dernières forces, et le balança contre le mur. Hier soir il avait bu, beaucoup, sûrement trop puisqu'il n'arrivait même plus à articuler et ne faisait que pousser un long grommellement qui réveilla Saul. Dans cette maison, on entendait tout. Ainsi les bruits de pas pressés de sa nièce le poussèrent à se lever, se précipiter sur la porte et la fermer à clé. Il la connaissait. Altruiste, généreuse, si cette porte fermée ne les séparait pas, elle serait déjà entrain de le prendre dans ses bras et de lui dire que tout va bien. Tout ne va pas bien, justement. Il se rassit, cette fois-ci plus calme, refoulant une envie de vomir. Il tâta le bois foncé, abîmé, de sa table de chevet et saisit calmement l'arme qui y était entreposée. Depuis quatre ans, chaque année à cette date, il est là, ce fusil. Chaque année il se dit qu'il est courageux, qu'après tout ce colt offert par son père pourrait mettre fin à sa peine. Il sourit, pensant à l'ironie qu'était le fait que son géniteur puisse le tuer. Après tout, nous sommes tous plus au moins des meurtriers. Son père, en lui donnant la vie, le condamne aussi. Donner la vie, c'est ça au final. Être à la fois un créateur et un tueur. Une larme coula le long de sa joue. Jack le savait. Il était un lâche, et cette année encore il ne pourrait pas. Sa fille lui manquait, terriblement même. Chaque jour sans elle était un déchirement que la routine quotidienne essayait de lui faire oublier. Mais ni Saul, ni ses rares amis ou encore les quelques femmes qu'il a côtoyées depuis, n'ont jamais réussi à lui ôter cette pensée. Cette pensée qu'un jour sûrement, il aurait le courage de prendre le manche luisant du pistolet, de le positionner sur le bord de sa tempe et dans un ultime élan, appuyer sur cette gâchette. Il le reposa dans la table de chevet, furieux contre lui-même. L'année dernière il s'était "laissé" une année, n'acceptant pas sa lâcheté. Cette année il sait ce qu'il en est. Il se rallonge dans son lit, grogne pendant quelques secondes et, fatigué, referme ses yeux humides.

" Jack, si je ne t'ai pas fais part de cette heureuse nouvelle, c'est que je savais que tu ne t'en serais jamais réjoui. Tu sais comme moi comment notre histoire s'est terminée, autrement dit mal. Oui je me suis accordée le droit de ne pas te faire part du fait que tu sois devenu père le quatorze mars 2000 d'une petite Margaret, mais tu m'avais toi-même dit quand tu m'as quittée qu'on "voulait des choses différentes, qu'être père ce n'était pas pour toi, que tu es trop jeune et qu'il serait mieux qu'on fasse notre vie l'un sans l'autre, n'ayant pas les mêmes attentes". Je t'ai écouté à la lettre, tu vois. Ceci n'est pas un message de haine, de rancoeur, je trouverai cela déplacé. Saches juste que si tu lis ceci 'est que je suis décédée. Tu connais mon passé avec mes parents, je suis fille unique et j'ai toujours foi qu'un enfant a besoin de vivre avec au moins l'un de ses parents. Dans le cas où tu refuserais -et personne ne t'en voudrait Jack-, ce serait Sassy, sa marraine, qui élèverait notre fille. ". Les yeux remplis de larmes, il referma doucement la lettre devant le notaire. Notre fille. Il sourit à la petite fille de trois ans qui se tenait sur sa chaise de droite. Elle lui répondit en montrant ses dents blanches, trop occupée à coiffer sa poupée. C'était une des premières fois qu'il quittait Cascade Locks depuis la fin de ses études et malgré le trajet Cascade Locks-Boston, il avait ses yeux bien ouverts. Le notaire comprenait la difficulté de la situation mais il insista que c'est Isabelle même qui avait vivement dit au notaire qu'elle souhaitait une rencontre entre lui et sa fille avant qu'il prenne toutes formes de décision.
Il avait vingt-neuf ans, après des dures années d'études, il avait enfin ouvert un petit cabinet de vétérinaire dans la ville de Cascade Locks. Il vivait les plus beles années de sa vie, vivant de sa passion pour la nature dans une ville calme, et voilà qu'il se retrouvait père du jour au lendemain. Bien sûr qu'il allait accepter de s'occuper de sa fille. Il se souvenait vaguement de Sassy. Elle n'était pas fiable et avait un penchant pour l'alcool. Cela ne l'étonnait pas de Faith. Elle avait toujours été comme ça. À faire des mauvais choix. Il soupira et regarda de nouveau sa progéniture. Aux premiers abords il ne lui trouva aucune ressemblance avec lui. C'était Faith, son portrait craché, ou du moins il ne voyait que des traits de Faith en elle. Puis au fil du temps, il dû admettre qu'elle lui ressemblait de plus en plus. Peut-être que vivre avec lui la rendait un peu plus Caldwell que dans le cabinet du notaire.

" Monsieur Caldwell, vraiment je suis désolé ". Un jeune flic devant lui, Jack était comme mortifié. Comme chez le notaire neuf ans auparavant mais en un million de fois pire. Il levait son poing comme s'il allait frapper le stagiaire, ce dernier eut un mouvement de recul. Finalement son bras se relâcha. " DEGAGEZ ! LAISSEZ MOI ! " et claqua la porte. D'un pas lourd, plein de haine, plein de rage envers ce monde et plus particulièrement envers Cascade Locks, il courût dans la chambre de sa fille. Des photos de lui et elle sur les murs et pourtant il n'en regarda qu'une. Celle de Faith tenant Margaret le jour de sa naissance. Il avait tellement de peine mais pourtant le sentiment qui le dominait était la jalousie. Il était triste et jaloux de Faith qui avait été rejoint par Margaret.

QUELQUES JOURS PLUS TARD " Lâchez-moi ! enlevez vos mains, j'ai dis lâchez-moi ! " On le tripote, le fouille, va dans le moindre recoins de ses vêtements. Une étude a montré que quand quelqu'un se tient à moins de quinze centimètres de vous, on se sent agresser. Jack se sentait agresser. Cela auraient été les mains d'une femme, il se serait peut-être moins agité mais là, il ne se retenait pas. "Monsieur! calmez-vous! c'est la procédure." Il regarda l'homme droit dans les yeux, le fusillant du regard mais se laissant faire. C'était la première fois que Jack s'emballait à cette fouille au corps, et pourtant, il y était habituée. Ce lieu ne lui était pas inconnu. Cela faisait maintenant quelques temps qu'il y venait aussi souvent qu'il le pouvait et qu'on le lui permettait. Au loin, il vit le visage familier qu'il venait voir. Elle lui sourit, lui aussi. Son visage était toujours illuminé ce qui étonnait à chaque fois Jack qui ne pourrait pas vivre entre ces murs. On le laissa passer et accéder aux tables. Il s’assit, essayant de ne se concentrer que sur son visage et non les paroles de toutes les personnes présentes dans la salle. " Bonjour tonton! " dit-elle d'un ton enjoué et rieur. Elle était au courant de ce qui s'était passé un peu plus tôt. Il lui avait écrit, ne pouvant attendre le parloir. Parloir qui avait été autorisé exceptionnellement une semaine plus tôt que celui prévu, aux vues des circonstances. Elle le savait et pourtant elle gardait cette bonne humeur. Il la connaissait, c'était sa façon de faire le deuil. Margaret, elle ne la connaissait que du début puis des parloirs où Jack l'emmenait. Néanmoins il s'était toujours efforcé de limiter sa présence dans cette prison, ce n'était pas bon pour elle. " Écoutes Saul, faut que je te parle.. Ils les ont pas arrêtés. Ils ont pas arrêtés les enculés qu'ont tué ma fille. Je.. je.. je crois que je vais quitter Cascade Locks..". Elle le regarde, cligne plusieurs fois des yeux, assez pour que Jck le remarque, et commence à élever la voix. " Si tu pars ils s'en tireront ! Restes Jack! tu.. tu peux encore essayer de les chercher? et puis, ton cabinet. T'as pensé à ton cabinet ? La maison? Tu sais quoi il me reste plus longtemps à faire, je sors bientôt tonton, je te rejoindrai d'accord, je t’aiderai. " dit-elle avec un sourire affectueux tout en lui tenant les mains. " Pas de contacts physiques, vos mains Caldwell, enlevez-les ". Jack lance un regard assassin à l'agent qui lui sourit d'un regard mesquin. C'est son boulot. Saul est connu dans la prison, la plupart des personnes y travaillant connaissent son nom. Après une minute en silence, Jack acquiesce : " D'accord.. ". Une fois le parloir terminé, il rentra chez lui. Sa maison était vide, son cœur aussi. Le néon de la cuisine l'aveuglait mais ce n'était pas grave. Un silence régnait, rendant les coups de fourchette encore plus sonore qu'en temps normal. Dans sa tête, il se répétait qu'il attraperait les jeunes qu'on fait ça. Il leur apprendrait comment être souls à en tuer sa fille va leur coûter cher. Et surtout, il leur fera regretter d'avoir fuis.